Contrairement aux apparences ces tableaux sont du même « style » car ils sont nés d’une même pratique mais qui a abouti à deux tonalités différentes. J’ai ressenti une lutte entre des mouvements dans le nº1 et un désir de silence dans le nº2. Bien entendu j’aurais été incapable de dire cela quand je les peignais. C’est seulement dans ce recul réflexif que je comprends que chaque tableau a eu un rythme corporel différent, rapide dans le n°1, lent dans le n°2 et qui a créé un espace propre à chacun. L’acte de peindre a consisté à tenter de renforcer ces deux tonalités :

    Le nº1 peut nous plonger dans des intersections simultanées qui s’entrechoquent et délimitent des formes rectangulaires et le nº2 dans un tissage vertical où des fils laineux se recouvrent.  Le nº1 semblerait musical alors que  le nº2 aurait une tonalité sourde,  en couches cotonneuses comme pour  protéger du bruit. Ces deux tableaux représentent en fait deux expériences à partir de rien et qui se sont traduites en formes, forces et interactions différentes. Ils ne composent qu’à peine une « image »,  au sens visuel du terme. Ils révèlent plutôt deux ambiances : en mouvement (n°1) ou en apaisement (n°2). La peinture est pour moi une circulation libre qui, pour accéder à son existence dans un espace doit se dégager de formes contraignantes.  Je voudrais que le spectateur comprenne que ma peinture est un chantier en  construction ou en démolition qui ne peut pas partir d’une idée mais d’une mise en  aventure. Je ne sais jamais ce que je vais faire, je me découvre dans un terrain inconnu et je ne verrai l’ensemble qu’une fois le tableau terminé. Ce que je « représente » malgré moi est un monde intérieur provisoire. Quand j’ai mis fin au tableau ne pouvant plus rien lui donner, il ne reste plus qu’un  verbe à l’infinitif. 

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